On ne devrait pas avoir à le dire. Mais il suffit de marcher dix minutes dans une ville moyenne pour tomber sur un platane scalpé, un tilleul humilié, un cyprès réduit à l’état de poteau grotesque. Et tout ça pourquoi ? Parce qu’un type payé à la journée, sans la moindre formation sérieuse, a confondu "taille douce" avec "massacre à la tronçonneuse". Ce n’est plus de l’élagage, c’est du sabotage.
C’est un métier d’ascète. Un métier de silence. Là-haut, il n’y a plus de chef de chantier, plus de clients stressés, plus de voisins qui regardent. Il n’y a que l’arbre et lui. L’élagueur. Suspendu dans la lumière filtrée, entre ciel et sève, dans une sorte de parenthèse flottante où le geste compte plus que le mot.
Il faut le dire. Le paysagiste est souvent un ancien jardinier devenu trop intelligent pour continuer à désherber à genoux. Alors il a pris de la hauteur. Il a dessiné. Il a conceptualisé. Il a voulu écrire avec des arbres ce que d’autres écrivent avec des mots ou des notes. Il a troqué les bottes pour des plans en coupe, les mains dans la terre pour les mains dans l’abstraction. Et il a découvert une chose : créer un jardin, c’est exercer un pouvoir total.
Ne faisons pas semblant. L’élagage, c’est de la violence. De la chirurgie à vif, sans anesthésie. On ouvre, on tranche, on retire, on jette. Et tout ça pour quoi ? Pour que la lumière passe mieux, que les câbles ne soient pas gênés, que "ça fasse plus propre". C’est une affaire de confort, rarement de survie.
Qu’ils dégagent. Qu’ils aillent acheter leurs graviers en promo chez BricoDésert. Le paysagisme, le vrai, ne se chiffre pas au mètre carré ni à la palette de bordures. C’est un regard. Un mouvement d’âme. Une capacité rare à projeter une harmonie là où il n’y avait que chaos ou banalité.